Remise de gaz sur approche interrompue

Nécessité d’une approche interrompue
L’interruption volontaire de l’approche finale avant atterrissage est parfois nécessaire suite aux situations suivantes :
- Piste occupée par un autre appareil,
- Présence inattendue d’obstacle, tel un animal par exemple,
- Paramètres de vol non stabilisés en courte finale (vitesse, plan, axe) pouvant induire un risque pendant la phase d’atterrissage.
Exécution de la manœuvre
La séquence initiale des actions à effectuer, bien connue des pilotes, est la suivante :
- Affichage de l’assiette de montée par action « à cabrer » sur le manche. Il est recommandé de ne pas afficher directement l’assiette normale de montée, mais une assiette intermédiaire, dite « Assiette d’approche interrompue », de valeur approximative « moitié de l’assiette de montée » ;
- Application de la puissance de montée. Ce sera en général « pleine puissance », en contrant les effets moteurs associés.
L’action préalable sur l’assiette, avant l’augmentation de puissance (procédure portant parfois à discussion…) est justifiée par l’objectif primaire de l’approche interrompue, à savoir « stopper immédiatement la descente » … principe qui ne pourrait pas être respecté si l’on procédait d’abord à une augmentation de la puissance sur la trajectoire descendante.
Le changement de trajectoire induit par la ressource entraîne une augmentation du facteur de charge, et par conséquent de la vitesse de décrochage.
Par ailleurs, le délai entre la rotation et l’augmentation de puissance fait que l’avion subit une décélération.
Facteur de charge pendant la ressource
La figure ci-dessous schématise la trajectoire de l’avion lors d’une remise de gaz. L’approche finale est initialement effectuée sur un plan de descente dont l’angle est γd, la vitesse sur trajectoire est désignée V.
En A, le pilote, après décision d’effectuer une approche interrompue, applique une variation d’assiette à cabrer par action sur le manche (= ressource).
Cette action est stoppée au point B, point à partir duquel la trajectoire revient rectiligne, de pente γm.
Le facteur de charge a pour valeur:
Fc = 1 + V . (γd +γm) / g . T
T : durée de la ressource

Exemple: remise de gaz d’un appareil initialement en finale sur un plan de 3° (5,2 %) avec une vitesse de 120 km/h. Après ressource, la pente de montée est de 4°. Fc est calculé pour/ différentes valeur de T (1, 2, 3 secondes).
ω : vitesse angulaire = (γd +γm) / T
R : rayon de courbure de la ressource
Fc1/2 : facteur d’augmentation de la vitesse de décrochage
T (s) | ω (rad/s) | R (m) | Fc | Fc1/2 |
1 | 0.122 | 295 | 1.45 | 1.20 |
2 | 0.061 | 591 | 1.22 | 1.11 |
3 | 0.041 | 887 | 1.15 | 1.07 |
Sur des trajectoires d’approche finale et de montée après ressources « standard », le paramètre qui influence le plus le facteur de charge, et donc l’augmentation de la vitesse de décrochage Vs, est la vitesse angulaire, et plus précisément la durée de la ressource, c’est-à-dire l’intensité avec laquelle le pilote applique la variation d’assiette à cabrer.
Le coefficient de majoration de la vitesse d’approche finale par rapport à la vitesse de décrochage de l’avion doit donc être supérieur à ces valeurs, afin de pouvoir effectuer une éventuelle remise de gaz en sécurité.
→ Le standard « V = 1,3 Vs », connu de tous les pilotes, permet donc de respecter ceci.
Décélération pendant la ressource
L’état des forces appliquées sur l’avion en finale est présenté ci-dessous.
La force de traction T est assurée, d’une part par la traction de l’hélice Th, d’autre part par la composante sur la trajectoire du poids de l’appareil, à savoir m.g.sin(γd).
Immédiatement après le changement d’assiette, la traction totale T s’est vue diminuée de la valeur m.g.sin(γd) et une trainée additionnelle est apparue, à savoir la composante du poids sur la trajectoire montante m.g.sin(γm).
La décélération instantanée à pour valeur:
Γ = – g.[sin(γd) + sin(γm)]

Il est intéressant de noter que cette décélération initiale et donc la diminution instantanée de vitesse en fonction du temps n’est fonction que des pentes respectives de l’approche finale et de la montée après ressource.
Elle est indépendante de la masse de l’avion et de sa vitesse initiale.
Cependant, cette valeur de décélération n’est valable que dans les tous premiers instants.
Effectivement, au fur et à mesure que l’avion voit sa vitesse décroître, la traînée initiale va augmenter. Celle-ci est essentiellement constituée de la composante « traînée induite » en raison de la forte incidence présente dans cette phase de vol à vitesse faible, et qui s’accroît quand celle-ci diminue.
La décélération va alors augmenter, proportionnellement à la masse de l’avion (la traînée induite est, elle, proportionnelle au carré de la masse).
→ La remise de gaz après variation d’assiette doit donc être effectuée d’autant plus rapidement que la masse de l’avion est élevée.
Exemple : DR 400 en approche stabilisée sur un plan de 3° (5,2%), vitesse 130 km/h. La ressource est effectuée jusqu’à obtenir une pente de montée de 2° (3.5%).
Zp = 0 T = 15°C
Le calcul est effectué pour 2 masses différentes : 700 et 900 kg.
La décélération initiale est Γ = – 0.85 m/s2 , ce qui signifie que la vitesse va décroitre initialement de 0.85 m/s, soit environ 2.8 km/h.
Ensuite, la vitesse chute suivant le graphique ci-contre.
Cela étant, dans cet exemple, et si l’application de la puissance maximum se fait au plus tard dans les 2 secondes après la variation d’assiette, on voit que l’impact de la masse de l’avion n’a pas le temps d’intervenir.
C’est surtout la variation de pente qui est l’élément dominant dans la décélération.

Note: les différentes situations de décélération de l’avion sur une trajectoire rectiligne, avec l’influence de la masse sont présentées ICI.
A télécharger:
- la documentation complète: remise de gaz sur approche interrompue 1.1